vendredi 9 juillet 2010

"La petite femme aux cigarettes", un deuxième roman bientôt publié !




Après Black-out, c'est au tour de "La petite femme aux cigarettes" de se faire publier à compte d'éditeur. J'ai appris cette excellente nouvelle en relevant mon courrier fin juin.

Toujours chez le même éditeur, of course, les gens honnêtes et passionnés sont si rares, pourquoi courir après Gallimard et perdre sa liberté artistique ?
Pour ceux qui ne connaissent pas, Chloé des Lys est une maison d'édition établie près de Tournai. Ils publient plusieurs ouvrages par mois.

Quelques mots sur ce deuxième titre maintenant...

"La petite femme aux cigarettes" est un drame post-surréaliste, largement inspiré par le conte d'Andersen "La petite fille aux allumettes".
L'histoire se déroule à l'époque actuelle, en plein coeur de Bruxelles. On y suit Anna, une jeune femme que la vie n'a pas épargnée. Elle vit seule avec sa fille encore bébé et est entourée de personnes dont l'existence ne tient qu'à des illusions : une mère que la folie emporte peu à peu et un patron généreux mais totalement en dehors des réalités.
Refusant d'être malhonnête pour s'en sortir, elle va entamer une véritable descente aux enfers pour finir par se retrouver à la rue. Cependant, alors que le froid se ravive et que le danger la guette, Anna croisera des personnages hauts en couleur qui ne peuvent vivre qu'aux frontières de l'imaginaire...

Extraits en ligne bientôt !

Je ne peux pas encore vous dire quand le livre sortira mais je m'attèle déjà aux corrections. Si vous dessinez et que participer à un projet littéraire vous tente, vous pouvez également prendre contact avec moi. J'aimerais faire illustrer mon roman dans un style proche de la peinture naïve de Henri Rousseau avec une touche surréaliste. (12 dessins pour chacun des chapitres).
L'histoire étant beaucoup plus accessible que celle de Black-out, ce roman sera certainement plus lu que le précédent, ce qui peut vous offrir une belle vitrine pour vos créations. (De plus une opportunité incroyable s'est présentée à moi il y a peu... affaire à suivre en septembre)

jeudi 4 mars 2010

Black-out : quelques scènes réprésentatives



"J'ai imaginé le monde que vous nous avez préparé."

Voici comment je décrirais l'univers de Black-out à un homme politique, qu'il soit de gauche maladroite ou de droite décomplexée.
Mais Black-out, c'est aussi un jeu constant sur les différentes mises en scènes. Le lecteur n'est ni tout à fait dans une réalité future probable ni tout à fait dans un monde surréel. Il erre entre les deux. En trois cent pages, il passera de la parodie à la mélancolie, de situations absurdes à une peur latente et bien réelle.

Pour avoir un petit aperçu au travers de différents extraits, cliquez ICI (Et rejoignez le groupe si ça vous plaît) :)

mercredi 3 mars 2010

Soirées littéraires





Novembre 2009, je tiens enfin mon premier livre entre les mains.

Décembre 2009, Black-out est référencé. (Le livre possède une existence juridique)

Janvier 2010 : première soirée littéraire à la Livre de Café, café littéraire montois.

Surprise ! Après plus d'une heure d'échanges, tous les participants qui n'ont pas encore lu le livre décident de se le procurer.

Février 2010 : deuxième soirée littéraire à la bibliothèque communale de Lessines. 24 participants. Et encore beaucoup de ventes et d'échanges passionnants !

20 Mars 2010 : Présentation de Black-out à Limoges (France). Merci d'avance aux collectifs des Slamtinbanques et aux Editions Black-out ! (Oui, même nom que mon bouquin, coïncidence :) )

"On est resté scotché parce que vous êtes tout à fait atypique."

"Vous êtes très convaincant. Je vous pensais plus âgé."

Des phrases entendues à la bibliothèque de Lessines qui m'ont fait chaud au coeur... Moi qui étais jadis prisonnier de mon propre monde, sans personne avec qui le partager.

mardi 2 mars 2010

Les perdants de Jean-Phillipe Querton : un must du roman noir




Il y a quelques années, alors que je scribouillais encore des textes plus ou moins gores ou plus ou moins romantiques, j'eus une brillante idée : participer au concours de nouvelles de la bibliothèque communale de Soignies. Pour une fois, les petits lots à gagner n'étaient pas là que pour mettre du piment dans le jeu. Parce que voyez-vous, d'habitude, à Soignies, si vous êtes une jolie donzelle capable d'aligner les platitudes, vous avez droit à un véritable gala quand votre beauté est officiellement reconnue par quelques vieux types amateurs de jambonneaux encore mineurs. Par contre, si vous prétendez écrire à dix-sept ans, vous passez pour un jeune un peu fou et peu fréquentable.
Cependant, cette fois-là, j'ai été dignement récompensé de mes efforts : j'ai gagné un livre de Jean-Philippe Querton, auteur dont je ne soupçonnais alors pas encore l'existence. En plus d'avoir adoré ce Poulet aux Olives, j'ai ainsi appris l'existence de Chloé des Lys, mon futur éditeur, et j'ai pu à nouveau trouver mon bonheur dans ce fourre-tout médiatique qu'on appelle Thriller, loin de la bouillie informe d'une Patricia Cornwell. Parce qu'avec Querton, vous savez, même le style est «gastronomique» tant il se savoure plus qu'il ne se dévore, laissant une agréable envie de retenter l'expérience plutôt qu'une vague impression de satiété.
C'est donc avec plaisir que j'ai retrouvé notre auteur et ses "Perdants" après un "Pronunciamiento" palpitant, une "Mortelle Praline" savoureuse mais plus légère et un "Homme à la Chimay bleue" touchant et ingénieux.
La surprise a été au rendez-vous. Dés les premières pages, je peine à reconnaître le Querton que j'apprécie, celui qui jongle avec les mots et les expressions en guise d'apéritif avant de nous servir une petite scène d'action en entrée pour mieux enchaîner sur le plat principal par après. Le Querton que je découvre ici se fait discret pour laisser place à son ou plutôt ses personnages principaux : un certain Monsieur Robert possédant une double personnalité.
Une plume sèche, tranchante nous présente cet être dual. Ici, tous les mots prennent leur sens comme un télégramme en pleine guerre. Il est des romans qui démarrent lentement, construisant leur univers au fil de la lecture pour proposer au lecteur une croisière paisible et lui offrir un peu de vacances. Il en est d'autres qui nous plongent directement dans un monde dérangeant, au travers de scènes aussi brèves qu'efficaces. Vous aurez compris que « Les Perdants » appartient à cette deuxième catégorie. L'histoire que nous raconte Jean-Philippe est tellement abominable que sans son talent, elle en serait certainement peu crédible.
Pourtant, ici, on ne peut qu'y croire. Ce n'est plus un livre qu'on lit mais un album de famille qu'on ouvre. Et la vieille dont le mutisme en dit long se penche sur notre épaule pour nous confirmer que non, on ne rêve pas. Apparaît alors au milieu de tout cela, la petite Aïcha, une lolita d'Orient. Douze ans, l'innocence d'une enfant pour certaines choses, l'esprit retors d'une adulte pour d'autres. Si Robert et sa famille sont une collection de monstres, les autres personnages sont loin d'être des anges. Un parti pris extrêmement dérangeant quand on aborde un sujet aussi grave que la pédophilie mais aussi terriblement salutaire en ces temps où certains intermédiaires auto-proclamés du Seigneur nouent parfois avec leurs enfants de cœur des relations plus qu'étranges. Mais au fond, il s'agit toujours d'une relation maître-élève, exactement comme ici et les clins d'œil à la Lolita de Vladimir Nabokov sont là pour montrer que les perdants est tout aussi contagieux, peut-être même davantage, Robert étant incapable d'intellectualiser ses hauts faits comme le faisait Humbert Humbert à chaque page.
Ce n'est d'ailleurs pas sans raison que j'ai commencé le livre un lundi et qu'il était déjà terminé le lendemain sans même que je m'en rende compte, mes envies pressantes de m'octroyer des pauses répétées au bureau pour pouvoir poursuivre ma lecture y étant sans doute pour quelque chose.
Arrivé à la fin, on ne s'étonne plus. De fin, il ne peut d'ailleurs y en avoir qu'une seule sans quoi cette histoire sordide serait purement gratuite, en dépit de toutes ses qualités d'écriture. Cela aussi, Jean-Philippe Querton l'a bien compris.
Dans "Pronunciamiento", l'auteur maniait déjà avec talent la noirceur et l'audace. « Les Perdants » reprend cet état d'esprit en faisant montre en plus d’une gestion du rythme irréprochable. Il y a donc bel et bien au moins un gagnant dans toute cette histoire : Jean-Philippe Querton.
Si le chiffre et les «mauvais bons sentiments» dictaient un peu moins leur loi en littérature, il est évident que notre homme trouverait une place dûment méritée au rayon Thriller de toutes les bonnes librairies. « Les Perdants » en a tout le potentiel, justement parce qu'il se refuse à prendre ses lecteurs pour des cons en leur donnant de vaines leçons de morale.
Il n'y a donc qu'une chose à dire pour conclure : si vous aimez les romans noirs, les styles qui accrochent tout en évitant le racolage, lisez ce roman et parlez-en à d'autres amateurs du genre. Il le mérite amplement.

lundi 1 mars 2010

Mars 2010 : vivre l'Hexagone au fil de ses diagonales.

L'incommunicabilité... Encore elle ! Heureusement, Mars fut suffisamment riche en activités littéraires pour cacher sa laideur avec quelques mots.

L'exode, juste derrière la frontière, avant le véritable exode peut-être...

Comme un rideau de fer que l'on tire.

Pour oublier.

Ce petit bonheur entré dans mon coeur comme par erreur.

Parfois, j'ai voulu disparaître avec lui. Et avec toi aussi, l'errance. Parce que tu rends le jour terrible surtout quand la lumière se meurt.


Trêve de romantisme !


La première fois que j'ai pris la route en mars, ce fut pour atteindre Lille, ses jeunes guindés qui me montraient du doigt et ses jeunes guinzés qui avaient un style encore plus exubérant que moi. Je me suis perdu. A tous les coins de rue. Même quand j'étais certain de mon chemin. Heureusement, une gentille secrétaire d'école m'a envoyé un véhicule pour me mener vers ce riche coin du Nord.
Le salon était très people et moi très populaire, dans le sens "pauvre" du terme. A l'accueil, des petites donzelles de bonne famille en costume se disputaient ce qu'elles appelaient mon bagage : un sac en plastique un peu crade.
Après ça, je me suis encore un peu perdu. Puis, j'ai vu Laurent Dumortier, le boss de Chloé des Lys et Benoît Freenay, autre auteur, peut-être plus matinal et certainement mieux orienté que moi.
La papote était sympa ; j'étais content de revoir Laurent. La bouffe aussi était sympatoche. Les donzelles nous ont même offert un journal un peu beaucoup de droite nous apprenant qu'il fallait se mobiliser aux régionales pour empêcher ce mollusque de François Yollande, socialiste éhonté, de mettre une claque à ce pauvre Sarko.



Quant aux ventes... Eh bien j'ai vendu comme peut vendre un rebelle gauchiste belge dans une riche bourgade française !

A peine quelques jours plus tard, direction Limoges, avec Nicolas Diricq, chanteur et slammeur talentueux. Même que j'avais droit à emmener d'autres invités mais que personne d'autre n'a voulu... Merci à Nico pour sa présence donc ! :)

Limoges, beaucoup plus loin de la maison mais plus près de chez moi. Allez comprendre le paradoxe ! Enfin, c'est pas si compliqué : du bon vieux rock des 90's dans des bistrots dark mais chaleureux et des affiches du NPA et du Front de Gauche un peu partout. De quoi se sentir bien accueilli !
Première soirée, le slam était mis à l'honneur. Une petite scène, avec les planches qui craquent comme dans les films, des comédiens et des danseurs qui étaient aussi de la partie. Le lendemain, après avoir récompensé nos gosiers comme il se doit, on est parti traquer un cercle de poètes un peu particulier : les poètes souffleurs qui vous murmurent leur texte à l'oreille dans un truc-bidule-machin-chouette que j'aurais dû appeler tuyau pour faire simple. Entre deux activités, on s'est posé pour enregistrer un numéro de "Au slam et caetera" émission slam qui passe sur Beaub.fm, radio du Limousin.
Puis, soirée littéraire, avec Christian Brissart, publié aux éditions Black-out. Là, j'ai sorti le Jean-Mi que j'avais ramené avec moi malgré son poids. Il a fait rire le public. J'étais fier de lui, non d'un Becker !
Après évidemment, tout s'est terminé dans un bistrot à l'ambiance typique. Je me suis endormi à l'heure à laquelle je me réveille d'habitude. C'est tout dire !



Merci encore à Eva Li, Charlotte Laurent, Christian Brissart et Fabrice Garcia pour l'accueil et la découverte !

N'hésitez pas à visiter les liens ci-dessous pour plus d'infos :

Les Editions Black-out



Les Slamtimbanques

Salons littéraires




Après Tournai la Page le 14 novembre 2009... Bondues (Lille) le 13 mars 2010 !

Je sortirai à nouveau l'argument choc pour voir si ça aide toujours autant à susciter l'intérêt. (Bon, il y a pas de nain hongrois hargneux dedans mais sait-on jamais...)

"- Ca parle de quoi ?
- C'est ...* blabla inside*... Ca se moque aussi des hommes politiques.
- J'le prends ! "

dimanche 28 février 2010

La Livre de café




Mons, son ambiance particulière, ses brillants édifices, ses parcs fleuris en plein centre ville, son petit avant-goût de France... Ce fut un excellent choix pour mes études.

Mais il manquait quelque chose... que j'ai eu la chance de découvrir alors que se croisaient l'été et l'automne 2009.

Dés que vous passez la porte, vous vous apercevez que cet endroit est unique. Dans ce café, se dégustent la fine fleur de la littérature locale comme les thés et cafés du monde. Mais la Livre de Café, c'est avant tout un lieu de rencontres. Ici, les générations se côtoient et les arts se répondent. Lecture de nouvelles, scène théâtrale, scène musicale ouverte, soirée auteur, slam, jeux de société... voici un petit aperçu des activités proposées.

La livre de café
Rue d'Havré 87
7000 Mons

CLIQUEZ ICI POUR PLUS D'INFO

vendredi 6 novembre 2009

Jean-Michel

Voilà une nouvelle humoristique que j'avais écrite juste pour m'amuser au départ mais que certains ont trouvé "géniale" pour le style comme pour les personnages, la chute et la réflexion sous-jacente. (ce qui, sans fausse modestie, m'avait d'ailleurs étonné)
Alors, je la poste ici, pour en faire profiter ceux qui ne l'ont pas lue et parce que j'aimerais bien trouver un "Jean-Michel" et un caméraman pour qu'on puisse en faire une petite pièce. Je pense que ça peut marcher.

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Jean-Michel


La nuit, la plupart des gens dorment. D'autres baisent. D'autres encore sortent en boîte. Moi, la nuit, j'écris. Enfin, j'essaie.
Seulement, là, c'est le jour. Donc, je ferais mieux de ne pas essayer. Si je vous parle de la nuit, en fait, c'est pour mettre le tout en situation, pour que vous m'imaginiez face à un encrier et une bougie, en train de chercher mon inspiration dans les toiles d'araignée qui pendent au plafond. Vous savez, le vieux cliché à la Poe de l' écrivain maudit nimbé d'un nuage de poussières. Ah, vous n'y avez pas cru ? Merci de me le signaler. Je ferai attention désormais. Se vautrer en racontant sa propre histoire, il y a mieux. Déjà que je me vautre d'habitude. Parce qu'avant, voyez-vous, j'avais de l'ambition. Et dire que j'ai renoncé à tout pour une blonde. Une super banale en plus ! Du genre de celles qu'on trouve dans toutes les grandes surfaces. Mine de rien, ça m'apporte pas mal de sagesse et un début de bide, la blonde. Bientôt, je serai insouciant et heureux. Chouette.
Donc voilà, après avoir tenté de créer un début ambiance, je vais vous amener à la situation initiale, parce qu'il me manque le talent pour faire autrement. On a le pauvre type qui écrit de la merde la nuit. Manque plus que le deuxième perso, un gros lard, et leur lieu de rencontre habituel,
le container de la rue Daerden.
La scène se déroule tous les samedis matin, avec des chats de gouttière aux yeux jaunes pour seuls témoins. D'un côté du container, on a un type avec une panse qui lui tombe sur les genoux, vêtu d'un caleçon violet et d'un t-shirt informe parsemé de tâches de graisse. Il paraît vraiment bonhomme, le bougre. Dans ses poignes, il a les manches d'une brouette joliment rouillée. Lui, c'est Jean-Michel. Ou Jean-Mi pour les intimes. Chaque semaine, il vient jeter ses cannettes. Des demi-litres de Cara pils pour être précis. Paraît qu'il en siffle vingt sur une journée. Je vous laisse compter le nombre de cannettes qu'il balance, le gros tas.
En face de lui, il y a un type en col blanc, les yeux dédoublés par d'affreuses lunettes de banquier. Quelques poils lui poussent encore sur le caillou et de grosses cernes lui maquillent les yeux. Il conduit également une brouette mais remplie de papier froissés. Ca, c'est moi.
J'ai tellement honte de ce que j'écris que je fais disparaître les preuves. C'est devenu un véritable rituel : mon week-end, je le débute en déchargeant mes daubes dans le container au coin de ma rue. Oui, je sais, c'est scandaleux. Faudrait d'ailleurs qu'on me taxe spécialement pour ça, j'avoue. Mais putain, qu'est-ce que ça soulage !
Vous pouvez pas savoir à quel point ça fait un bien fou de se dire qu'on ne peut pas avoir écrit ces daubes puisqu'elles ne sont plus là. De se sentir dans la peau d'un auteur vierge qui s'apprête seulement à coucher ses premiers mots sur papier. C'est dans ces moments-là que j'espère qu'il y ait peut-être bien des petits bouts de génie perdus en moi. D'ailleurs, souvent, dés que je me suis déchargé de mes bafouilles, les chats miaulent et me font des yeux en demi-lune. A moins qu'ils attendent les fonds de cannette de Jean-Mi...
Je sais pas. Laissons planer le doute. C'est plus valorisant pour moi.
Donc ça va, vous retenez ? Au début, il y a un container, des bafouilles, des cannettes de bière et Jean-Mi.
Maintenant, faut que vous sachiez comment c'était entre moi et le gros avant que l'élément perturbateur ne se ramène. Vous savez le truc qui bousille tout et sans lequel il n'y aurait pas d'histoire. Pour faire simple, on pourrait résumer nos relations à quelques échanges de courtoisie. Du style :
- Ca va m'fieu ? qu'il me lançait.
- Ouais, m'fille, que je lui répondais.
Ma réplique était nulle mais ça le faisait rire. Au bout d'un temps, j'ai fini par en savoir pas mal sur son compte, le Jean-Mi. Et sans même le vouloir. Ce type est du genre à ruminer tout seul, vous comprenez.
Voilà, c'est tout pour la situation initiale. Maintenant, il nous faut changer d'ambiance sinon la suite va pas être crédible. Allez, je vous mets un peu de pluie fine et quelques arpèges de piano. Imaginez-moi à présent la tête entre les mains et dites vous que je pleure. On est parti sur le bon gros cliché de l'écrivain dépressif, là.
Pourquoi ? Attendez, je vous donne la raison sinon vous allez pas percuter tout seul. Eh bien en fait, jusqu'à ce jour, mon absence de talent n'était qu'une hypothèse. Puis, il s'est passé quelque chose et c'est devenu une certitude. A cause de quelques mots. Les mots ont une de ces putain de forces, putain. Quelques mots ont complètement anéanti mes milliers de lignes. Et moi avec.
Donc, avant ça, j'avais écrit un court roman tellement naze qu'il en devenait absolument jouissif. Ca s'appelait «Le retour du guerrier». Le héros était un jeunot de quinze piges qui ne jurait que par les jeux vidéos et les mangas. Jusque là, ça va. Par contre, la suite est un peu plus pimentée. Parce que voyez-vous, le gars, après s'être piqué au hasch – ouais, il avait de super grosses veines – eh bien, il a fait un bad trip et il s'est retrouvé à bord d'un avion piraté par des terroristes enturbannés. Ces suppôts de Khomeini étaient venus enlever nos femmes pour en faire des esclaves en Iran ! Alors, avec son sabre laser qui est apparu comme par magie, il les a tous dégommé. A l'aéroport, une dame l'attendait dans un coin : c'était la marquise de Maquignolle qui sollicitait son aide. En effet, des témoins de Jéhovah avaient découvert une mystérieuse relique biblique qui permettrait de pousser l'humanité tout entière au suicide collectif. Notre jeunot a directement capté que les terroristes musulmans voulaient également récupérer cette relique. Donc, la marquise et lui ont uni leurs forces et ont traqué les barbus et les témoins un par un. Mais une malédiction s'est abattu sur notre jeune héros qui s'est retrouvé possédé par l'esprit d'un samouraï revenchard. Tout en poussant des cris en japonais qui ne voulaient strictement rien dire, il s'est mis à décapiter les passants. Heureusement, après, tout finit bien car en baisant la marquise, il revient à lui. Quant aux barbus et aux témoins, ils se retrouvent pris à leur propre piège en se disputant l'objet sacré et donc ils s'entre-suicident tous. Et voilà. Fin.
Donc, oui, c'était le summum de la merde ce roman-là. Le sujet était à la fois complaisant et racoleur, le scénario absurde et la syntaxe se limitait souvent à la juxtaposition d'un sujet, d'un verbe et d'un complément. Mais au moins, c'était drôle si on prenait ça pour une parodie ou si on était vraiment un gros pété du bulbe.
D'abord, le manuscrit a fait le tour des collègues, qui en riaient presque autant que d'une bonne blague salace. Fort de mon succès, j'ai mis mon petit chef d'oeuvre en ligne. Etant modeste, je me suis d'abord orienté vers un simple forum de littérature, destiné aux «jeunes écrivains» qui plus est. Malheureusement, une heure plus tard, un post d'une seule ligne m'annonçait qu' «il y a de la bonne merde mais que ça, c'est de la chiasse bien grasse qui parvient difficilement à se moquer des autres formes de merde puisqu'elle est encore plus liquide.». L'auteur avait juste laissé deux lettres pour toute signature. D'autres commentaires du même genre suivirent bien que moins acides. Tous contenaient ces quelques mots pourtant si pénibles «C'est de la merde.» L'affirmation, indiscutable, tournoyait dans ma tête et me faisait voir des trucs horribles comme une armée de zombies, un super-méchant aux super pouvoirs ou... Jean-Michel se bâfrant d'un hamburger dégoulinant de graisse.
Putain, je parvenais même pas à être un génie du médiocre ! Vous vous rendez compte ? Le manuscrit est donc allé rejoindre les autres textes infortunés dans la brouette, direction poubelle.
Ce samedi-là, j'ai encore vu Jean-Michel. Toujours aux abord du même container, celui pris en sandwich entre deux rues malfamées, sous une vieille affiche aux dimensions démesurées nous apprenant qu'il fallait voter PS pour continuer à vivre bien.
Jean-Mi paraissait assez tristounet lui aussi. Les rougeurs joyeuses de l'alcool peinaient à dissimuler ses yeux marrons arrondis par les larmes. De plus, sa brouette ne contenait que cinquante cannettes. J'en étais sûr : un évènement malencontreux avait dû se passer dans la vie de Jean-Mi, un évènement sans doute aussi dramatique que celui qui venait de secouer la mienne.
- Ca va m'fieu ?, a-t-il fait à demi-voix.
- Non, m'fille, lui ai-je répondu.
Le gros a cherché mon regard et j'ai cherché le regard du gros. Il avait les yeux ronds et gentils d'une otarie. Ca devait être un gars bien.
- Tu vi' en bir' une avec mi', m'fieu ? Ca m'fera del compagnie. J'ai maux m'tiet, m'fieu.
Cinq ans qu'on se voyait là, comme ça, tous les samedi matins, charriant notre honte et c'était seulement maintenant que nos langues se déliaient.
Siffler des bières avec Jean-Michel. Quelque chose que j'aurais difficilement accepté d'habitude. Mais il me fallait du partage dans ma vie. Jean-Mi m'ouvrait à son vice et je lui ferai goûter le mien. A moins que ce ne soit l'inverse. Sur le coup, j'ai protesté, je me suis montré distant. Finalement, j'ai accepté parce que je devais vivre des péripéties pour meubler la suite de ma pitoyable histoire.
- Tu brayou à cause d'une coumère ? a lancé le gros, curieux.
- Non, je pleure à cause de moi. Je veux écrire et je suis nul.
- Ca c'astou ti qu'il dit, m'bite ! Tu veux que je rwète ce que t'avou écrit ?
- Vous lisez ?
J'ai posé cette question à Jean-Mi de la même façon qu'on demande à un muet s'il parle. J'imaginais difficilement le bougre lire autre chose que la Dernière Heure les sports.
- Et vous, qu'est-ce qu'il ne va pas ? ai-je ajouté comme il tardait à me répondre.
- Mi, ça s'atou l'célibrité. Je ne supporte ni d'être connu.
- Hein ?
Jean-Mi a encore fait mine de ne pas avoir entendu. Le pauvre devait souffrir d'hallucinations. En tout cas, à part se déhancher sur des rythmes disco la panse à l'air, je voyais pas le genre d'activités qui pourrait lui valoir d'être sous les feux des projecteurs. Je l'ai donc suivi en silence, intrigué à l'idée que le gros avait peut-être bien des choses croustillantes à raconter.
Ma première surprise concernant Jean-Mi a été de remarquer qu'il n'habitait pas dans le traditionnel taudis borain mais dans une belle maison de maître à colombages, probablement la seule de toute l'avenue du Champ de bataille, splendide voirie qui n'avait pas volé son nom. Ce gros tas était-il notaire, médecin ou avocat ?
- Punaise ! Qu'elles se cassent, ces coumères !
Jean-Mi venait de beugler ça comme s'il avait vu le diable en personne. Au pied de sa porte, une poignée de femmes quinquagénaires, le nez plissé et l'air vaguement intellectuel, trépignait des deux pieds. Elles brandissaient des panneaux ridicules. L'une d'entre elle, frisée comme un caniche et drapée dans un affreux parka vert bouteille, a pointé un doigt sur lui. Toutes les autres se sont alors mises à l'insulter.
- Tu veux «tâter de la femme», Jean-Michel Plume ? Nous, on veut tâter tes sous !
- C'est quoi ça ? ai-je fait, intrigué.
- Ca, ç'astou des féministes, m'fieu. Et mi n'savou ni comment les faire décamper. Elles m'asticotent, m'fieu. Attends, file-mi une pinte !
Jean-Mi m'a indiqué son sac à dos et m'a prié de l'ouvrir. J'ai sorti un-demi litre de Cara pils et je lui ai tendu. Il a secoué la cannette puis l'a ouverte et la mousse a giclé un peu partout. C'était comme une bombe. Paniquées, les féministes ont levé le camp, de peur de recevoir en pleine tête le jus viril. A voix basse, elles se promettaient de revenir au plus vite.
- Peut même ni rentrer a s'baraque !
Jean-Mi paraissait excédé.
- C'astou tous les d'jou ainsi, a-t-il ajouté.
- Que vous est-il arrivé ?
- Attends, m'fieu, tu vas comprendou. J'vais te faire rwetir de ces choses. Tu vas vir comme ç'astou bia m'vie avant !
Et Jean-Mi m'a ouvert sa porte. De nombreuses lettres tapissaient le sol du hall d'entrée. Jean-Mi en a saisi une et l'a déchirée en soupirant après avoir lu les premières lignes.
- C'est quoi ?
- Qu'est-ce que c'astou ? Une lettre d'avocat. Alzin taper ça dans l'poubelle. Du brun, ces gens. Du brun ! Ils ne savou faire que remuer l'purin.
De plus en plus étonné par la vie que mon hôte menait, j'ai dévisagé la galerie de portraits qui décoraient son intérieur. On y voyait Jean-Mi en compagnie de célébrités du petit écran. Sur un des clichés par exemple, il rigolait franchement avec Stéphane Bern pendant que Vincent Mac Doom, en arrière plan, affectait une moue dégoûtée. Une autre photographie le montrait entouré de beautés qui promenaient avec volupté leurs ongles vernis sur son énorme panse.
- El prix des lectrices de Nous deux. Ah, j'en ai rweti, mi, de la blondasse, commenta Jean-Mi.
Il s'est éclipsé trente secondes, pour aller chercher des bières puis il m'a jeté sur les genoux un vieil exemplaire du Nous Deux qui titrait «Jean-Michel, son histoire.» Curieux, j'ai parcouru le torchon féminin jusqu'à trouver l'article en question. Voici comment ça se présentait :
«Plus rocambolesque mais moins terre-à-terre que du Dan Brown, aussi inspiré que du Werber et encore mieux écrit, Jean-Michel Plume et ses héros au grand coeur ont fait beaucoup parler d'eux ces derniers temps. Son dernier opus, «Opération commando dans la Sierra Nevada», pourrait bien dépasser les cent milles exemplaires vendus en un mois. L'occasion pour nous de se pencher un peu plus sur ce nouveau Dieu de la littérature qui semble être fait de paradoxes.»
Le journaliste poursuivait sa page en mettant en contraste l'allure grossière de Jean-Michel et la grande sensibilité qui transpirait de ses textes. Une gamine de quatorze ans intervenait dans un encadré titré « Les larmes de Selma : mon premier roman» pour expliquer au lecteur comment la prose du gros lui avait permis de se découvrir une passion pour les belles lettres. Enfin, le journaliste clôturait son article en souhaitant «bonne chance à ce sacré bonhomme plus intègre et peut-être même plus doué qu'une Nothomb ou qu'un Musso.»
Là, j'étais franchement sur le cul. J'arrivais déjà pas à piger comment un type qui s'exprimait dans son patois pouvait imprimer de ces phrases qui mettaient tout le monde d'accord, du pseudo-critique littéraire à la donzelle adolescente. En plus, Jean-Mi et moi, on aurait presque pu être copain. Une opération commando dans la Sierra Nevada, pensez-vous. C'est tout ce que j'avais toujours voulu écrire. D'ailleurs...
Non, faisons s'arrêter là les coïncidences, la situation était déjà suffisamment blessante pour ma personne.
- Quelle chance vous avez ! me suis-je finalement exclamé. Ils parlent de vous comme d'un Dieu ! Toutes les nuits, je bosse ferme afin de pouvoir être un jour à votre place.
- T'es ni net, ti ! Mi, je suis harcelé el mi-temps del journée. J'vais resaker tous mes brols d'ailleurs. Les filles astou bonnes mais ça s'astou que des putes quand même. Et maintenant, les vieilles filles, elles me cherchent le brun.
Jean-Mi s'est dirigé vers le hall d'entrée et a commencé a enlever tous les cadres lui rappelant sa vie passée. Il ponctuait ses gestes de gorgées de Cara pils bien fraîches.
- Mais que s'est-il passé ?
Ce n'était pas une simple question de convenances. L'histoire de ce bonhomme avait fini par me captiver réellement.
- J'avou écrit un bia roman, m'fieu. El roman qu'il me fallou écrire. Ca causait de mi et de mes tentatives avou les femmes. Ca s'appelou «Le beau repaire.» Parce que c'astou el bistrot où j'avou passé m'jeunesse.
Jean-Mi m'a arraché des mains l'exemplaire du Nous Deux et m'a lancé le dit roman à la figure. Il m'a servi une nouvelle cannette pour accompagner ma lecture. Le prologue m'a tout de suite séduit. En voici un bref extrait :
«Ce matin, j'avais encore envie de tâter de la femme. Je me sentais vide, de la tête aux couilles. La dernière bière bue la vieille était très mal passée. Elle m'avait tordu le tube digestif, me privant de mon appétit. Jusqu'à ce que je vois la Monique passer. Elle avait mis une jupe. La première fois de l'année. Ses cuisses étaient bien pleines et ses hanches se gondolaient avec grâce sous mes yeux. Une belle matrone de campagne. La Monique, je devais me la faire. Pour continuer à me sentir homme.
Je me rendis au frigo. J'avais besoin d'un petit remontant. Hélas, mes abrutis de copains avaient tout vidé. Désemparé, je me glissai dans la salle de bain pour y retrouver ma fidèle bouteille d'eau de Cologne.»
- Votre début est excellent, vraiment, ai-je dit en toute honnêteté.
- Eh bien, m'fieu. Les peyes de la télé ils n'ont ni pensé ça. El bouquin d'où là, il m'a juste apporté que des misères. Quand j'ai vendu moins, les féministes me sont rentrées dedans. «Vous êtes un vieux vicelard !» qu'elles geignaient ces vieilles filles d'où là. Et là, le brun a commenci. Le brun, m'fieu. Le brun !
Jean-Mi s'est levé en tenant son bide et a ramassé une des lettres qui traînaient dans le hall d'entrée. Puis, il me l'a jetée au nez, toujours avec la même délicatesse.
- Rwet, m'fieu. Ces femmes ont demandou à ces avocats d'où là de me faire des misères au nom des droits de l'homme. Elles trouvent que j'les dégrade, ces salopes.
Effectivement, le courrier rappelait que personne ne devait être discriminé à cause de sa couleur de peau, de sa religion, de son sexe ou de son orientation sexuelle.
- Et il da, des comme ça ! Il da tout plein ! a précisé le gros.
- Oui, c'est le brun, ai-je approuvé, reprenant son expression fétiche. Enfin, moi, je ne peux pas connaître ça puisque j'écris de la merde.
De violents coups ont interrompu notre conversation. Des gens étaient en train de défoncer la porte de Jean-Mi.
- Ca, c'astou les pires, les fans, les vrais. Ceux qui ont remarqué que «le beau repaire» astou un très bia roman et qui veulent me vir. Ils sont devenus bezingues depuis que les féministes me cherchent le brun. Mais ça, ça me met dans le brun aussi, m'fieu.
Jean-Mi s'est emparé d'une batte de base-ball et a gagné le hall d'entrée. Il a fait sauter le verrou et leur a hurlé de toutes ses forces «Ersakez-vous ! Ersakez-vous !» Il avait des allures de grizzli qui rendaient ses ordres impérieux.
Moi, j'en ai profité pour fouiller sa bibliothèque. Quelque chose m'intriguait depuis tout à l'heure. Après quelques minutes de recherche, j'ai pu mettre la main sur «Opération commando dans la Sierra Nevada». J'ai feuilleté le roman avec impatience. Quelques passages par-ci par-là m'ont appris que c'était mauvais, extrêmement mauvais. Des phrases très scolaires, rédigées à la va-vite. Un manque d'idée affligeant. J'ai alors repensé au bureau, à la fenêtre, aux avions et aux terroristes. Puis, je me suis revu aux abords du container, semaine après semaine. Pendant cinq ans. Mes nouvelles de merde et la pisse de chat de Jean-Mi.
Tout s'est éclairci dans ma tête. La rage m'est montée aux tempes mais est vite retombée. Ce bonhomme n'avait plus aucune vie. Dans le fond, c'était tant mieux qu'il soit devenu un Dieu de la littérature à ma place. A côté de son quotidien, le monde des cols blancs ressemblait à un paradis.
Alors, je l'ai regardé une dernière fois, le Jean-Mi. Et je me suis tiré par la porte arrière. Mais je ne suis pas parti sans rien. Je lui ai piqué un de ses bacs de bières. Et là, j'ai commencé moi aussi à me prendre d'amour pour la blonde.